Jean-Paul Sartre / Anne Simon / Théâtre National du Luxembourg
© Bohumil KOSTOHRYZ boshua pour TNL
Personne ne considère vraiment Lizzie, une jeune prostituée, comme une femme respectueuse jusqu’au jour où elle devient témoin d’un crime.
On tente d’obtenir de Lizzie une fausse déclaration pour permettre de sauver l’assassin blanc. L’honnêteté d’une putain face à la loi du plus fort ? Acceptera-t-elle de faire un faux témoinage afin d’attirer enfin le respect social et de permettre la chasse au nègre?
Jean-Paul Sartre, écrivain incontournable du vingtième siècle, décrit dans cette pièce percutante, qui par moments a des allures de comédie satirique, une jeune prostituée déchirée entre le choix de faire un faux témoignage, afin d’acheter sa tranquillité et la reconnaissance des blancs de la ville, ou le choix de dire la vérité qui lui vaudrait la persécution de la société blanche. L’auteur dépeint l’aliénation de ceux qui non seulement sont opprimés, mais n’arrivent pas, du fait de cette oppression, à se révolter. Ils deviennent ainsi consentants, même quand ils découvrent que cet ordre se fonde sur la violence et l’injustice.
Richard Wright, qui s’était lié avec Sartre après son émigration, avait tenu à écrire un avant-propos pour la traduction américaine de La Putain respectueuse afin d’expliquer la pertinence du principal choix dramaturgique de Sartre: Sartre sait que ce qu’on appelle problème noir aux Etats-Unis n’est pas du tout un problème noir, mais bien un problème blanc, un moment du problème américain en général. Cet argument est à la base de la mise en scène qui utilisera une version combinée entre la première et la dernière version, et le scénario dactylographié de Sartre.
Dans une esthétique de pseudo film noir – l’époque de création de la pièce y incite -, où il n’est jamais clair qui est dans la situation du détective et qui joue le rôle de la femme fatale, Anne Simon, la jeune metteure en scène qui réalise ici sa première mise en scène en langue française, montre que la problématique raciale reste toujours ouverte. Aux Etats-Unis comme en Europe.
Mise en scène
Anne Simon
Décors et costumes
Jasna Bosnjak
Avec
Valérie Bodson, Christophe Linéré, Marco Lorenzini, Pitt Simon, Serge Wolf