© Bohumil KOSTOHRYZ | boshua | théâtre du centaure
Pourquoi monter aujourd’hui cette pièce créée en 1930, une époque qui ne connaissait ni téléphone portable, ni facebook, où pour communiquer il fallait passer par les demoiselles du Téléphone, quand les femmes étaient encore dépendantes de leur mari et que certaines avaient pour seule occupation d’attendre le retour de l’être aimé…? Au delà de l’aspect «restauration» d’une telle entreprise (mais ne doit-on pas faire connaître aux jeunes, au nom de la culture générale, les chef- d’œuvres du passé…), au delà de l’aspect «anniversaire» (effectivement nous commémorons les 50 ans de la disparition de Jean Cocteau…), que nous dit en 2013 cette pièce célèbre qui met en scène une femme seule, au téléphone pendant une heure, avec un interlocuteur que nous ne voyons et n’entendons pas ? Eh bien, croyez-moi, dans sa sobriété cette œuvre nous dit aujourd’hui comme il y a 80 ans et comme rarement, ce que c’est que d’aimer d’un amour absolu et ce que c’est que d’être quitté, abandonné par l’être aimé. On pense évidemment à Bérénice, à Eurydice, mais le génie de Cocteau est de dire cette expérience humaine par les mots d’une femme «ordinaire», il dit même «médiocre» et demande à l’interprète de re- specter les fautes de syntaxe qu’il a savamment mises dans le texte. Le grand art de Cocteau dans La Voix Humaine provient de sa connais- sance de l’être humain et des vécus individuels : il savait les transmettre par une écriture faussement simple, mais très maîtrisée. Cette boulever- sante Voix Humaine gardera toujours une force unique.
de Jean Cocteau
mise en scène Marja-Leena Junker
avec Nicole Dogué
scénographie et lumières Jean Flammang
costumes Caroline Koener
assistante à la mise en scène Renelde Pierlot